Par Professeur Samir Hamza, enseignant chercheur en biomécanique et biomatériaux à l’INSAT
La réussite des étudiants à l’université était l’un des axes de réflexion retenus lors des réunions au niveau du ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique. Des efforts louables visant à sauver l’année universitaire sont en cours. La majeure partie des propositions élaborées aux conseils scientifiques des écoles d’ingénieurs ont tourné autour de l’évaluation de l’enseignement à distance pendant la période de confinement dû à la Covid-19.
Il est du devoir et de la responsabilité de l’université d’assurer la réussite des étudiants. Un constat s’impose, à savoir que le ministère s’est lancé dans l’aventure de l’enseignement à distance, et ce malgré les difficultés rencontrées, mis à part le manque des moyens techniques et organisationnels.
Parlons avant tout de respect. C’est d’abord le respect que l’administration doit observer à l’égard de ses enseignants et de ses étudiants. Je ne m’attarderai pas, ici, sur la vétusté des bâtiments, la décrépitude du mobilier et du matériel désuet, ni même sur le salaire de misère que perçoivent les enseignants. Il faut le reconnaître en toutes circonstances, les enseignants doivent respecter les directives du ministère de tutelle.
Ici, il est nécessaire de mettre en exergue trois points indissociables : le premier est que les enseignants ont recours aux nouvelles technologies de l’information et de la communication pour pouvoir mieux enseigner et pallier le retard, qu’aurait causé la suspension des cours pendant le confinement. Sans perdre de vue la valorisation du diplôme, il faudrait réfléchir à l’accréditation pour ne pas léser les meilleurs étudiants; ceci est le deuxième point. Le troisième point est le souci permanent d’assurer un enseignement de qualité qui élèverait le niveau national, afin de construire la société de demain.
Les cours par visioconférence appelée « e-learning » qui est pratiquée dans les universités les plus prestigieuses, est un mode d’apprentissage qui a été également instauré par de nombreuses institutions universitaires tunisiennes et qui épargnent aux étudiants les déplacements notamment, pour ceux qui habitent dans les régions lointaines.
Il convient de réitérer encore, ici, que l’enseignement à distance prédomine et va continuer à occuper la place centrale dans les préoccupations des universités, en particulier, comme processus de travail en général. Effectivement, il est préférable que l’étudiant se confronte d’emblée dans le cadre de ses études aux nouvelles technologies. Désormais, il devra se familiariser avec les différents logiciels et apprendre à collaborer et à travailler en équipe. La plupart des universités pour ne pas dire toutes, dans les pays développés s’orientent vers ce nouveau mode d’apprentissage basé sur les NTIC.
Les enseignants font face aujourd’hui à de nombreux obstacles inhérents à l’acte pédagogique. Ils dénoncent souvent les échecs d’un système et les déceptions de certaines situations. Néanmoins, ils savent apprécier les moments de satisfaction qui sont le fruit des résultats obtenus par leurs étudiants, à qui ils ont prodigué temps et patience, afin de faire surgir la compréhension d’une notion. Là est leur devoir ; là est leur passion.
L’accréditation : un dossier qui n’avance pas !
L’accréditation est une procédure totalement volontaire en Tunisie. Aucun établissement n’est officiellement tenu d’y avoir recours. Mais rares parmi les écoles d’ingénieurs qui se tiennent à l’écart de cette procédure, car l’accréditation est un passage obligé pour recevoir certains soutiens financiers essentiels et pour que les étudiants eux-mêmes puissent obtenir certaines bourses.
L’Insat, par manque de gouvernance, a opté pour le choix de ne pas entrer dans la cours des grands. Une administration, qui opte pour un enseignement classique se met à l’écart du monde qui se transforme et qui se modernise. L’accréditation universitaire reste un slogan insignifiant vis-à-vis des revendications des étudiants, qui ne cessent de s’amplifier. Il est bien clair aujourd’hui que le dossier d’accréditation n’a pas du tout avancé.
La cellule d’assurance qualité : ce vaste chantier
Des voies s’ouvrent pour que l’université Tunisienne se métamorphose et marque son positionnement au sein de l’espace mondial de la connaissance. Prenons l’exemple de l’université de Tunis Manar, qui nous a impressionnés par ses actions, lors du Covid-19, ainsi que par sa classification honorable et encourageante grâce à sa volonté et à une gouvernance réfléchie. C’est, certes, là le résultat de plusieurs mois de travail. La période actuelle constitue ainsi un tournant majeur, qui transforme les concepts universitaires. Il faudra du temps et des appuis pour permettre la mise en place durable d’une réforme pour une mise à niveau de l’enseignement de l’université, tant sur les modalités de transmissions du savoir que sur la mise à jour des faits technologiques, du savoir, et de leur philosophie.
La cellule qualité favorise la mise en place d’équipes chargées de l’assurance qualité au sein de l’établissement. Elle contribue à la mise en œuvre de la politique assurance qualité définie par l’université et le ministère de l’Enseignement Supérieur et la Recherche Scientifique. En outre, elle est chargée de l’autoévaluation, c’est-à-dire de vérifier le niveau des équipes pédagogiques et de la qualité de la formation.
Sommes-nous aujourd’hui capables de faire naître une véritable volonté pour traiter les dossiers valorisants et significatifs pour notre établissement ? Tant que cette volonté est absente, nous ne pourrons pas satisfaire les ambitions de nos étudiants et leurs inspirations et leur donner l’espoir d’un avenir meilleur.
Que conclure ?
Aujourd’hui, il n’y a plus ni la même motivation ni la même volonté. Nous nous sommes fourvoyés. Le système éducatif est en total décalage par rapport au monde. Sommes-nous toujours capables de mettre en place une stratégie, afin de sauver notre système éducatif ? Une réforme s’impose de fait.
Par conséquent, ambitionner de s’engager dans une véritable rénovation universitaire nécessite des réformes profondes en adéquation avec les progrès scientifiques, techniques et technologiques. La réussite de celles-ci reste largement tributaire d’un engagement, d’une culture et d’un savoir-faire pédagogique, qui ne manqueront pas d’avoir un impact sur la qualité de nos enseignements et nos formations et corollairement sur l’ensemble des activités professionnelles et sociales.